Un match (pas) comme les autres
A chaque derby casablancais, un leitmotiv revient dans la bouche des supporters: match comme les autres ou match pas comme les autres. Pas comme les autres bien évidemment. Pour les passions qu'il déchaine, les flots de paroles qu'il engendre, la peur de la défaite qu'il entretient dans les esprits, les tifo que confectionnent les riverains des deux virages, Frimija et Magana.
J'ai l'air fin lorsqu'on me reproche que MON derby c'est finalement un match comme les autres, ou comme tant d'autres matches insipides et ennuyeux. Et bien je persiste et signe. Hier la choréographie d'avant-match valait à elle seule le déplacement. Même Gerets qui en a vu d'autres, en Belgique, en Italie, en Allemagne, en Hollande, en Turquie ou encore au stade-vélodrome marseillais est impressionné par le chaudron vert et rouge. La preuve le match-retour avec l'Algérie il souhaite le jouer à Casa. "Je veux l'enfer", nous a-t-il confié un matin dans Mars Attack.
Je conviens que le foot c'est surtout ce qui se passe sur le terrain. Certes, pas grand chose à se mettre sous la dent mis à part les deux buts (sur balle arrêtée, plutôt lorsque l'enjeu est de taille) et quelques rares actions dangereuses (une seule parade digne de ce nom à l'actif de Nadir Lemyaghri).
J'ai l'impression que le WAC, classement oblige, tente de faire le jeu d'entrée tandis que le Raja se contente de voir venir. Après le but de Benkaijan sur corner d'Ajeddou et l'expulsion de Fettah, les Verts sentent que le vent tourne. Profitant de leur supériorité numérique, ils prennent davantage de risque et se déversent plus facilement dans le camp adverse. L'égalisation de Hassan Tir est un régal pour les uns, un bourde de notre portier national pour les autres.
Le derby ce n'est pas un match comme les autres. Et j'en sais quelque chose. Je suis à Bari le 29 mai 1991 pour la finale de la Coupe d'Europe des Champions Etoile Rouge de Belgrade - OM et à Pasadena le 17 juillet 1994 pour la finale de Coupe du Monde Brésil - Italie. Au total, 240 minutes de jeu, zéro but marqué...Et pourtant, les attaquants de qualité ne manquent pas: Savicevic, Prosinecki, Pancev, Papin, Waddle, Abedi Pelè, Zinho, Bebeto, Romario, Roberto Baggio, Donadoni et Massaro.
Enfin, je suis mal placé pour me plaindre du tacticisme outrancier affiché par mes amis Fakhreddine et M'Hamed. Un grand entraineur se plaisait à dire que la quintessence du football c'est le zéro-zéro. Comme en physique lorsque deux forces de même valeur s'annullent...